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Enfants de Cornouaille
Il me semble que Lakevio avait déjà proposé cette toile de Harold Harvey mais j’aime beaucoup cette toile alors il ne me reste plus qu’à trouver une autre idée pour éviter de me faire taxer de « recyclage ».
Le moment étant à l’été et aux balades dans les prés, auriez-vous par hasard une idée de ce que pensent ces deux enfants pendant cette halte champêtre ?
Arrivés depuis quelques jours à Kerviguennou, nous sommes pour trois semaines en vacances dans ce coin de la Cornouaille bretonne où sont nés nos parents.
Alain, mon jeune frère s’ennuie déjà ! Il a dû laisser à Paris ses copains et surtout, notre père n’a pas voulu lui confier son vélo, un Alcyon de compétition qu’il lui lèguera un jour ou l’autre. Papa, ancien coureur du Tour de France, accompagne Alain chaque jeudi au Vel’ d’Hiv’ pour l’entraîner, mais le plus souvent, c’est à la Cipale de Vincennes qu’ils vont faire leurs chronos. L’Alcyon est une antiquité précieuse à laquelle notre père est très attaché.
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Tante Jeanne a dit où nous trouverons notre oncle Joseph, occupé à faire les foins, et elle nous a chargés de lui apporter le solide casse-croûte qu’il attend.
Tel Apollon sur son char, dans la vaste prairie où il travaille, Oncle Joseph est assis comme sur un trône dans son tracteur Lanz, qu’il a maintenant bien en main.
L’an dernier, après avoir fait cent fois (enfin… au moins dix…) le tour des bâtiments de la ferme avec chacun des membres de la famille, il avait ainsi pu se familiariser avec le maniement de sa merveille mécanique.
Comme les autres, nous nous étions accrochés à l’oncle pour ne pas tomber, alors que nos cousins fanfaronnaient, s’asseyant sur les ailes qui couvrent les énormes roues et faisaient semblant de tomber, puis se rattrapaient vite fait, nous faisant des clins d’œil appuyés pour nous renvoyer d’un coup à notre condition de citadins froussards...
Nous sommes restés longtemps, Alain et moi, à regarder notre oncle tracer son chemin en traînant la faucheuse dans la prairie blondie par ce début d’été puis nous avons couru vers ce coin d’herbe que la proximité de la rivière Ellé a laissée verte. Me débarrassant de mes sandales, je me suis laissé tomber tandis que mon frère se roule sur le tapis fleuri, comme le gamin qu’il est encore. Soudain, il me tend une aigrette duveteuse de pissenlit, que j’ai saisie avec délicatesse. Mais mon souffle a suffi pour qu’elle laisse s’envoler les fins filaments porteurs de graines.
« Je sème à tous vents »
Et, à l’instar de la semeuse des dictionnaires Larousse, nous avons cueilli les aigrettes et semé à tous les vents d’Ouest venus de l’Atlantique soufflant sur notre Cornouaille…
Sûrement un bel avenir attend les amateurs de « dents de lion » qu’ils mangeront en salade dès l’an prochain !