Soixante deux ans après
Retrouvailles
Cet homme semble bien triste.
Il pense...
Mais à quoi ?
Sur quoi ou qui se penche-t-il ?
Qu’attend-il ?
Qui attend-il ?
Je n’en sais rien.
J’en saurai peut-être plus lundi.
Je saurai peut-être ce que vous en direz.
J’aurai pensé à quelque chose.
Une histoire.
Une prémonition…
À lundi donc...
Pour être franche, je ne sais ce que fait cet homme dans mon histoire où il n’a aucun rôle…
Vous avez sûrement oublié mon amie Joyce la Texane avec laquelle j’ai tant traîné mes guêtres autour du monde… Joyce donc, a eu des problèmes cardiaques qui l’ont contrainte à vendre sa maison pour entrer dans un ‘’ghetto de luxe’’ dans la banlieue de Dallas.
L’entrée de l’appartement voisin affiche une plaque avec un prénom ‘’Linda’’ et une Tour Eiffel. Intriguée, Joyce frappe à la porte, fait la connaissance de Linda et le courant passe entre les deux femmes.
_ Pourquoi la Tour Eiffel ? demande Joyce
- J’ai vécu deux ans en France lorsque j’étais étudiante il y a près de soixante ans… répond Linda
Bien sûr, elles ont parlé de Blanche la Nantaise…
- Mais c’est à Nantes que j’étais… dans une famille que j’aimerais retrouver…
C’est ainsi qu’il y a près de deux ans, j’ai reçu la mission de retrouver ceux qui survivent de la famille D. chez qui Linda a vécu !
Premièrement, je contacte mes amis de l’asssociation Experiment avec laquelle nous avons reçu tant d’adultes (dont Joyce et Weldon son mari en 1985) et d’étudiants venus de partout : USA, Japon, Chine, Hong Kong, Corée, Ousbekistan… et j’en passe…
La famille D. ne figure pas sur sa liste des familles. Les listes décennales des décès à Nantes m’ont permis de savoir que les parents sont morts depuis longtemps, mais aucune trace des deux enfants, adolescents à l’époque de Linda.
Ma quête a été longue, difficile. Le Rectorat a refusé de me communiquer les coordonnées de B… D. dont j’avais fini par savoir qu’il était professeur à la fac. Mais un de mes amis lui aussi professeur a pu se procurer la précieuse adresse. Il ne figurait pas aux abonnés téléphoniques et j’ai dû me déplacer, montr les trois étages d’un vieil immeuble nantais classé sur les quais du port, frapper à la porte qui ne s’est pas ouverte…
Mais j’ai au moins pu communiquer à Linda l’adresse de B. et ils sont entrés en contact.
J’avais presque oublié cette histoire lorsque récemment, j’ai reçu un courriel de Linda m’annonçant qu’elle venait à Nantes avec sa fille pour quelques heures et qu’elle souhaitait que l’on se retrouve dans un resto près de chez B.
Le croirez-vous ? J’ai accepté de sortir dans le pic de la canicule le samedi 18 juin alors que j’étais si bien au frais dans ma vieille maison aux murs épais. C’est ainsi que j’ai assisté aux retrouvailles soixante deux ans après, de deux vieux adolescents devenus grands-parents…
Et c’est aussi la raison pour laquelle, trop épuisée, je n’ai pas fait mon ‘’devoir’’ du lundi, mais au moins, notre prof Monsieur Le Goût peut lire mon billet d’excuses avec retard, certes, mais il me pardonnera j’en suis sûre