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Le sourire de Malika
Le sourire de Malika
Je l’ai repérée, voire reconnue, tout de suite.
Elle m’a évidemment ramené à l’époque où je ne pensais pas à des tas de choses sans intérêt.
Peut-être dans votre mémoire erre un souvenir que, j’en suis sûr, nous aimerions tous entendre.
Raconté par vous il n’en sera que plus chouette.
Alors à lundi…
Nous avions le même âge et étions dans la même classe.
Sa joie de vivre était évidente, même si elle habitait avec ses parents dans une cahute dont le toit percé laissait filtrer la pluie mais que son père n’avait pas même idée de colmater…
Totalement soumis à son épouse Olga, une Algérienne (on ne connaissait pas le terme de Maghrébine) il ne faisait dans leur couple que de la figuration quasi muette. C’était un brave homme qui suivait sans broncher le chemin que lui désignait sa terrible compagne. Celle-ci m’impressionnait beaucoup car elle avait deux tatouages en X sur les pommettes, mais elle m’avait ‘’à la bonne’’, peut-être parce qu’elle me savait amie de sa fille, ou peut-être aussi parce que j’étais la fille des épiciers-cafetiers du quartier, et que Maman comptait plus largement aux mères de jeunes enfants le lait entier selon les livraisons. Le lait écrémé était en vente libre pour les plus de 15 ans sous l’Occupation…
Il faut bien le dire, Olga fréquentait plus longuement le café que l’épicerie adjacente, et René son mari venait l’y rejoindre avec Malika, qui venait à la cuisine jouer avec moi ou faire nos devoirs, toujours enjouée. Olga avait parfois le vin mauvais, et Malika savait la calmer, René restant impavide.
Je crois qu’elle était une fillette heureuse et choyée de ses parents.
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Comme moi, elle devint nubile vers 11/12 ans : nous étions enfin des ‘’grandes’’ !
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Un soir de septembre, après un bombardement au cours duquel un avion anglais avait été abattu et s’était écrasé tout près de chez nous, Malika ravie, me confia qu’elle allait se marier ! Comment était-ce possible ? Comment allait-elle faire la cuisine pour son mari en continuant d’aller à l’école ? Car aucune de nous n’imaginait que sa vie d’écolière devrait finir… et nous ignorions surtout ce qu’implique le mariage et que l’on appelle le devoir conjugal…
Qui était le futur ? Je pensais aux garçons que nous connaissions dans notre quartier, des vieux d’au moins 16 ans… Malika me parla alors d’un ami de ses parents qu’elle connaissait un peu, et qui ne lui déplaisait pas.
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Lorsque j’en parlai à mes parents, ils ne me crurent pas.
Quelques jours plus tard, Malika me raconta qu’il y avait eu une terrible dispute entre ses parents et que son père avait même frappé Olga qui était tombée : pour la première fois de sa vie sans doute, René était sorti de son apathie pour farouchement défendre sa fille.
Les terribles bombardements des 16 et 23 septembre 1943 vidèrent la ville de ses habitants et nos chemins prirent une direction différente. Je n’ai jamais revu Malika…
Cette histoire est vraie, sauf le prénom que je ne parviens pas à me souvenir.
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Mes recherches généalogiques m’ont permis de savoir que deux au moins de mes ancêtres ont été mariées à 12 ans, et l’une même à onze ans et trois mois : le curé qui l’a mariée lui attribue l’âge ‘’d’environ 15 ans’’, alors que le même registre contient l’acte de baptême de Gillette, l’enfant qui n’a pas choisi son destin.
Mon devoir sur Marie Laurencin est juste ci-dessous.
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