Ophélia et Oscar
Ophélia et Oscar
Ce serait bien que ces mots, par lesquels vous commencerez votre devoir, vous inspirent :
« Sur l’onde calme et noire où dorment les étoiles… »
Et vous le terminerez par cette phrase de Patrick, non, pas « Patriiiick ! », l’autre, Modiano :
« Encore aujourd’hui, il m’arrive d’entendre, le soir, une voix qui m’appelle par mon prénom, dans la rue. »
Entre les deux, vous contez sans compter…
§
Sur l’onde calme et noire où dorment les étoiles… Une enveloppe portant ces mots est tombée du carton où dorment de vieilles photos depuis si longtemps. Intriguée, je l’ai fébrilement ouverte et…
Oh ! j’avais oublié cette photographie, prise dans studios de Boulogne-Billancourt à l’aube de ma carrière au cours du tournage de ce film ‘’ Ophélia : Suicide ou Accident ?’’ qui fut un bide retentissant… Pensez, un polar à la sauce hippie d’après Shakespeare !
Qui aurait pu penser à cette époque que la débutante que j’étais serait oscarisée quinze ans plus tard ? Je me souviens encore combien j’étais furieuse au moment de cette scène avec un metteur en scène débutant… Comment s’appelait-il donc ? Il n’a pas fait long feu dans le métier, celui-là !
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Il est bien gentil… mais je commence à me geler les miches, même si l’eau dans laquelle je suis censée flotter a été tiédie et que les projecteurs diffusent de la chaleur… mais à force de refaire encore et encore la scène ; je devrais avoir très vite la tête de mon rôle : la morte !
Pourquoi ai-je accepté ce rôle sans trop lire le contrat ? Comme toujours en début de carrière, on signe sans réfléchir… trop content(e) d’avoir décroché la timbale.
La seule chose de positive (en dehors du cachet qui a été le plus gros que j’ai eu depuis ma sortie du Conservatoire,) c’est le gout des baisers de Roméo… enfin… Hamlet, mais je préfère penser à Roméo, tellement plus romantique qu’Hamlet qui a salement laissé tomber son Ophélie.
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J’en étais tombée follement amoureuse mais notre romance n’a duré ce que durent les roses et chacun de nous a fait sa vie ailleurs...
Mais…
Encore aujourd’hui, il m’arrive d’entendre, le soir, une voix qui m’appelle par mon prénom, dans la rue.