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15 avril 2019

Le poète et l'inconnue

Mais voilà qu'il flotte !

Le poète et l'inconnue

John Salminen

"En haut de la rue Saint-Vincent, un poète et une inconnue,
S'aimèr'nt l'espace d'un instant, mais il ne l'a jamais revue.
Cette chanson, il composa, espérant que son inconnue,
Un matin d'printemps l'entendra quelque part au coin d'une rue."

(La Complainte de la Butte)

 C'est de "l'espace de l'instant" que je voudrais que vous me parliez.

 Histoire inattendue, éphémère, dès lundi !

 §

Lilian a relevé le col de son veston élimé aux manches trop courtes qui ne lui couvrent pas ses mains gercées bleuies par le froid. Il a quitté la rue des Saules où les cuisines du Lapin Agile laissent flotter alentour des odeurs de poulet frit qui l’ont fait saliver. Son ventre crie famine malgré le quignon de pain que ce matin, le commis du boulanger, celui d’en face le Consulat, lui a glissé dans la main en douce.

Il n’est pas pressé de rentrer dans la mansarde glaciale qu’il partage avec Arthur, ce gars de Charleville dont les coups de gueule avec Paul, autre poète, lui rendent la vie si difficile. Mais ils n’ont pas le choix, ils tirent tous le diable par la queue. La logeuse sachant qu’elle ne peut louer son galetas qu’à des loqueteux aussi pauvres qu’eux, n’est pas trop exigeante.

La nuit est maintenant tombée, l’allumeur de réverbères a rempli son office et ranimé la flamme de ceux du quartier Montmartre. Lilian est arrivé tout en haut des marches de la rue St Vincent et son regard s’arrête sur une silhouette blottie au pied de l’un d’entre eux. S’approchant, il plonge dans un regard bleu si pâle que son cœur se serre. Sans un sou en poche, il a relevé la jeune mendiante qui lui tendait la main et l’a serrée contre lui. Son fichu qui s’est alors dénoué a laissé flotter des boucles que la lune nimbe d’or roux. Ils restent ainsi serrés, aussi grelottants l’un que l’autre. Il voudrait tellement lui donner un peu de chaleur, mais son pauvre corps est aussi glacé que celui de la jeune fille. Ils se sont longtemps regardé, n’ont échangé aucune parole, mais un long baiser a scellé leurs lèvres gercées par le froid. Ils sont ainsi restés enlacés flottant dans un autre monde où ils n’auraient plus jamais froid ni faim.

Un sifflement bref a soudain sorti les amoureux de leur rêve éveillé. L’adolescente a bondi et couru à toutes jambes vers l’homme massif qui se tient dans la lumière avare d’un réverbère et semble lui demander des comptes. Lilian a esquissé un pas pour secourir son inconnue, mais l’homme a vivement entraîné la jeune fille, lui entourant les épaules d’un châle qu’il avait apporté. Le papa peut-être… que la misère a contraint à envoyer mendier ses enfants ?

Lilian le sait : il la retrouvera et pour cela, il va remuer ciel et terre et composer une chanson qu’elle entendra forcément puisqu’il mettra dans la confidence ses compères musiciens montmartrois qui chanteront pour elle le message qu’il lui lance comme une bouteille à la mer et qu’il appellera :

La Complainte de la Butte

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Commentaires
C
L'amour, la misère...la Bohème...<br /> <br /> Montmartre. Je me suis dépaysée, merci Gwen<br /> <br /> •.¸¸.•*`*•.¸¸☆
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A
Très beau texte
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E
Tout à fait lachanson ...tu nous la fais vivre avec é motion....
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A
c'est follement romantique :-)
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R
Un mot un air et tac c'est dans la tête , très agréable ton interprétation <br /> <br /> Ce matin ton pseudo chez moi ne fonctionnant pas , je viens en cliquant chez une voisine que je suis venue visiter :) système D<br /> <br /> Bonne fin de journée <br /> <br /> Bises
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