Montmartre à Balata en Martinique
8 mai
Lulu, Jean-André et leur Djinn sont partis ce matin pour Barbuda. Depuis les Trois Ilets, il faut faire le tour de la baie pour atteindre Fort de France juste en face, où nous ne ferons que passer puisque le but de la journée est le jardin de Balata. Hélène se remémore en riant la description qu’un journaliste du cru avait faite de la préfecture de Martinique : Fort de France, la ville tentaculaire…
Au détour d’un virage, sur les hauts qui dominent la ville, se dresse un édifice dont la silhouette est reconnaissable au premier coup d’œil : le Sacré Cœur de
Montmartre, ou du moins, sa réplique à petite échelle ! Pas de doute, dès l’entrée, le visiteur apprend qu’en 1915 l’archevêque avait souhaité faire ériger cette église en hommage aux soldats tombés au front. Autour de la coupole court un texte : Au Sacré-Cœur la Martinique reconnaissante.
Elle est remarquablement et abondamment fleurie depuis l’entrée jusqu’à l’autel et les chapelles latérales, mais aussi aux dossiers des bancs qui accueillent les fidèles. Une famille va pieusement s’agenouiller devant chaque autel et semble là pour remercier le Ciel de quelque
chose d’important qui lui a peut-être été accordé.
La proximité du Jardin de Balata explique la profusion et la qualité de la décoration florale. Depuis la placette-parking qui s’étend devant l’église, la vue s’étend sur la baie de Fort de France et sur la mer.
Créé il y a une trentaine d’année par un horticulteur artiste et autodidacte dans
le jardin de la maison créole familiale où il jouait enfant, cet éden est devenu au fil des ans un lieu paradisiaque incontournable de l’île. J’avoue honteusement que
je n’en avais jamais entendu parler jusqu’à ces derniers jours... mais je n’oublierai pas ce jardin que j’ai découvert avec délices. Royaume non seulement des fleurs,
des arbustes et des arbres gigantesques, colibris, sucriers et oiseaux divers en ont fait leur domaine.
Un sentier balisé serpente qui permet au flâneur une vue totale sous divers angles des massifs qui, à l’inverse des jardins botaniques, offrent la plus grande diversité d’espèces et de teintes dans la plus grande fantaisie apparente.
Un énorme ficus étrangleur enserre de ses racines un arbre dont le tronc a été totalement enveloppé sans le faire souffrir puisqu’il continue à vivre malgré son encombrant voisin. Le créateur a parcouru le monde afin de réunir une collection qu’il entreposait sur place faute de ne savoir qu’en faire. Les circonstances ont voulu qu’à un moment, il eut l’opportunité de racheter Balata à sa famille, et le résultat est sous nos yeux. Je vous invite à aller voir
Hélène et Bernard ont acheté un livre épais sur la biodiversité de Guadeloupe et Martinique puisque leur jardin tropical est lui aussi devenu au fil du temps le jardin des merveilles, créé sur un sol calcaire en tuf corallien et peu de terre, mais où aujourd’hui colibris et oiseaux sucriers se partagent l’espace.
La route est sinueuse entre les ravines jusqu’à Morne Rouge où un panneau « La Chaudière » nous invite à déjeuner.
Par plaisanterie, Bernard dit au serveur qui s’approche pour nous placer dans une salle déjà remplie qu’il voudrait être servi par une jeune fille… Celle-ci doit être très demandée car il se passera un très long moment avant que l’on vienne prendre notre commande. Hélène aura eu tout son temps pour apprivoiser un oiseau qui finit par venir manger dans sa main. Une tablée voisine de 5 convives a commandé entre autres choses des accra qui nous sont servis… et que l’on mange en attendant le reste qui finit par arriver après une très longue attente. Le manque d’organisation fait que tout le personnel semble débordé pour des clients impatients.
La Montagne Pelée a la tête dans les nuages 112 ans jour pour jour après son éruption explosive qui détruisit St Pierre et anéantit ses 30.000 habitants à l’exception de 2 rescapés. Nous verrons St Pierre dans quelques jours.
Pour l’heure, nous sommes à la distillerie JM dont fut propriétaire la famille Crassous de Medeuil (au patronyme si particulier qu’il a dû susciter bien des contrepèteries !). Comme beaucoup d’alcools, et au Japon le saké ne fait pas exception, leur parfum est généré en grande partie par la qualité de l’eau qui est utilisée pour le ramener au degré souhaité. Ici, elle descend directement de la Montagne Pelée qui domine les champs de canne de la distillerie, et le visiteur est invité à la déguster venue directement de la source. il y a longtemps que j’ai appris à l’école une chose que les ans m’ont permis de savoir erronée, à savoir : l’eau est incolore, inodore (pas toujours) mais en aucun cas sans saveur !
Nous sommes arrivés trop tard pour la visite de l’usine, les machines viennent de cesser de tourner, mais la boutique est ouverte et une dégustation est proposée. Il n’y a plus de fruits pour un planteur et je n’aime pas le rhum, même en ti-punch. On me propose une décoction de citron vert et c’est aussi délicieux que rafraîchissant. Je regrette de ne pas avoir pensé à acheter deux bouteilles pour rapporter aux amateurs de la famille ?
Nous sommes revenus en longeant la côte Est de l’Atlantique jusqu’à la Pointe de la Caravelle en traversant des villages sans touristes.
Une fois encore, j’ai prononcé à bord « le » mot interdit ! C’est en parlant d’oignons et de cuisine que la chose s’est faite sans que j’aie vu le danger venir ! Je détestais les oignons dans ma jeunesse, et aujourd’hui, je peux avoir la main lourde dans quelques-unes de mes préparations : ainsi dans la gibelotte de XXXXX, j’en mets au moins un kilo à confire… Le nom de l’animal aux longues oreilles a fusé sans que j’aie pu le retenir mais Captain Bernie qui n’a pas les siennes dans ses poches a réagi et me voilà une fois encore vouée aux gémonies ! Serai-je clouée au pilori en haut du mât ou devrai-je proposer de leur offrir le resto ? La solution la plus agréable pour tous a enlevé les suffrages…
Punch/planteur à bord avant d’aller juste en face déguster les plats de cuisine créole de « La Marine » : accras, boudin antillais, crabe farci…
Un chanteur musicien et sa sono vont-ils nous empêcher de dormir ? Jusqu’à minuit, mon sommeil va être entrecoupé d’applaudissements, de cris d’enthousiasme, mais je ne me réveillerai qu’à 7 h passées.