Bahia

24 – Sao Salvador da Bahia de Todos os Santos

Vendredi 28 janvier 2011

Réveil à 6.30 h : Joyce est déjà partie. Pour l’instant le navire longe encore la côte et nous ne serons amarrés à quai qu’à 8 h. La vitesse du bateau est en fonction de la distance à parcourir, et il était évident, hier après-midi, que nous avancions en douceur, avec deux moteurs sur quatre.

J’avais pris un raccourci pour écrire le nom de Bahia, qui est Sao Salvador da Bahia de Todos os Santos qui signifie à peu près (je ne connais pas le portugais) Saint Sauveur de la Baie de Tous les Saints. Pas facile à écrire sur une étiquette !

A la sortie du bateau, une femme à la peau sombre, enturbannée de blanc, vêtue d’un corsage de dentelle et d’une ample jupe bleue qui la fait paraître énorme, tend un ruban de couleur à chaque passager, et j’hérite d’un bleu. A deux pas, une jeune fille mince est vêtue de même dont le ventre proéminent fait partie du costume. Elle tend elle aussi une publicité ornée d’un ruban, et une fois de plus, je suis vouée au bleu ! Je verrai dans la ville d’autres fausses matrones paraissant peser 200 kilos. Peut-être ces costumes sont-ils les héritages des anciens esclaves dans les cérémonies vaudou ? Je saurai plus tard que ces femmes sont les si populaires Bahianaises qui vendent dans la rue des beignets de farine de haricot et les plats de la célèbre cuisine épicée venue d’Afrique avec leurs ancêtres esclaves. Le Brésil a été la dernière nation à avoir aboli l’esclavage en 1888. En 350 ans, 4 à 5 millions de Noirs ont permis aux planteurs de canne sud-américains de faire fortune. Pourquoi ces costumes sont-ils aussi volumineux ? Peut-être pour souligner l’influence des « mamas » noires dont la richesse se mesurait à l’importance de leur corps…

Joyce a choisi la sortie Candomble, axée autour des origines africaines de 80% des habitants de Bahia, descendants directs des esclaves venus d’Afrique, parfois sur des navires nantais… Ils ont apporté avec eux leur cuisine, leur culture, leurs croyances, le vaudou, mais aussi l’animisme, où chaque déité est un élément de la Nature.

Yemanja, la déesse de la mer, Oxum, celle des lacs et des rivières, Oxala, dieu de la création, sont les plus importants orixas parmi d’autres qui constituent un vaste panthéon. Lorsque je verrai mon amie Marion, universitaire qui étudie depuis trente ans au Brésil les implications de l’animisme au milieu d’un catholicisme exacerbé, je saurai au moins de quoi elle parle. Nous nous sommes manquées de peu à Nantes avant mon départ, et elle n’arrivera à Bahia que dans quelques jours… 

Pour ma part, je souhaitais découvrir la ville, bâtie sur deux niveaux, les riches en haut, les autres en bas. Il y a un funiculaire public, mais certains résidents en ont un privé. A La Paz, l’une des deux capitales de la Bolivie (4.000 m d’altitude) ce sont les riches, et même les très riches, qui vivent en bas, les autres étant plus haut, où l’on respire moins bien. S’il reste des témoignages de la splendeur passée de la ville, qui a été la première capitale du Brésil, avant Rio de Janeiro et aujourd’hui Brasilia, nous les avons vus de loin, le bus étant incapable de stationner. J’aurais aimé aller sur un marché, mais on a surtout vu les plages (sur 40 km de côte qui cernent la péninsule de Bahia, il y a 85 km de plages ; certaines abritées aux eaux calmes de piscine, d’autres où se pratique un surf acrobatique, vu la puissance des déferlantes ; sur d’autres encore des jeunes ont inventé un nouveau sport, intermédiaire entre le volley et le football, et s’y adonnent avec passion. Sous des parasols, des tables permettent à ceux qui le souhaitent de se faire masser. Nous allons ainsi jusqu’au phare, où la nuée des vendeurs de T-shirts, colliers et bracelets, DVD, serviettes de bain etc... se ruent sur les malheureux promeneurs. Je n’ai rien vu jusqu’ici qui vaille le prix de cette balade en ville. Les favelas sont vues de loin, mais quelques petites rues traversées m’ont permis de photographier des graffitis et des mosaïques naïves. Juste une question à celle qui s’est gentiment moquée de moi lorsque j’ai écrit que sur 40 km de côtes il y avait 85 km de plages : sur une tringle de fenêtre de 50 cm de large, elle accroche quelle largeur de voilage ?

Ainsi que dans les pays aux maisons surpeuplées, les couples peuvent s'isoler pour une nuit dans des "hôtels" prévus pour les accueillir : leur nom est sans équivoque. Il ne s'agit en aucun cas de maison closes... Des passerelles permettent aux piétons de traverser sans danger les larges boulevards où, si la circulation n’est pas rapide, c’est que les encombrements empêchent les conducteurs de se défouler. Un petit lac  occupe le centre de la ville et de grandes statues colorées semblent posées sur le miroir de l’eau. Ce sont les déités africaines qui sont ainsi honorées, parallèlement aux saints du paradis chrétien… j’ai vu un panneau indicateur de direction qui signalait « Jardim d’Allah ». Y aurait-il aussi des musulmans ?     

Je suis restée longtemps sur le pont regarder s’éloigner Bahia dans les lueurs du crépuscule.

J’ai du mal à tenir les yeux ouverts, mais je reste présente pour le spectacle que nous offre le personnel indonésien, qui commence par l’hymne national philippin. Le fond de scène est un bus en contreplaqué  sur lequel est peint « God bless our trip » (Que Dieu bénisse notre voyage). Seraient-ils chrétiens ? Je poserai la question, car la plupart des Indonésiens sont musulmans. Chacun fait son numéro chanté ou musical, et les danseuses font des pas compliqués au-dessus de bambous croisés et décroisés sans se faire pincer les chevilles. J’ai dormi un peu pendant leur show et me suis écroulée dans le lit sitôt revenue à la cabine…

Comments

[trublion]

je constate qu' il n' est pas toujours facile de visiter une ville et ses environs, lorsqu' on est contraint du suivre les organisateurs.
j' ignorais que l' animisme occupait une si large place !
Mais après tout, pour les chrétiens qui considèrent que Dieu a créé le monde, ce pourrait être remercier dieu que de prier ses oeuvres.
je te souhaite une bonne fin de semaine
bises

[tiot]

Il est superbe ton reportage
Pas besoin de se déplacer on sait tout
sur ta journée
bonne soirée

[arlette]

Pourquoi ce nom me fait-il rêver? Les costumes, les couleurs, avec un peu d'imagination, on entend la musique! Que de beaux souvenirs!