L'Amazone mise en scène
10 - Santarém
Vendredi 14 janvier 2011
Le village que nous allons voir à une vingtaine de kilomètres de la ville et qui vit de la culture et de la transformation du manioc abrite quelques familles dont une poignée d’enfants est à l’entrée pour nous accueillir. Le plus petit est visiblement tout fraîchement coiffé et ses yeux rient autant que sa bouche… Un arbre manioc de six mois a quatre grosses racines et ce sont elles qui vont être transformées en tapioca.
Pelées, puis râpées, hachées, les racines sont encore fortement toxiques. Il faut une longue préparation avant qu’elles ne deviennent comestibles. La bouillie ainsi obtenue est insérée dans un long tube de vannerie et pressée pour n’en retenir que le jus qui, séché, va devenir une sorte de farine très blanche qui deviendra le tapioca. Les villageois sont visiblement en représentation. Leur job n’est pas la culture du manioc : ils sont en quelque sorte les habitants d’un village-témoin. Un hevea pleure son latex et les enfants redevenus des enfants jouent auprès de lui. Des dégustations de friandises diverses à base de manioc sont proposées, du café d’Amazonie cultivé loin d’ici, de l’alcool de manioc à 51° pour dix dollars (plus cher que le rhum Damoiseau de Guadeloupe TVA comprise…) les Brésiliens des campagnes ont vite compris les règles du business !
Je comprends aisément l’anglais de notre guide qui explique qu’à 44 ans, il est le dernier de 14 enfants (7 filles, 7 garçons) et qu’il est professeur de portugais (la langue nationale du Brésil) et guide quand son temps est libre. Il a lui-même trois enfants
Le petit musée de Santarém fait ce qu’il peut pour être à la hauteur, mais on en a vite fait le tour… même si de nombreux fragments de poteries précolombiennes y sont exposées. Plus intéressant est le point où se rejoignent les eaux claires du Rio Tapajos et celles, boueuses, de l’Amazone : elles se côtoient longtemps avant de se mêler, puis de s’épouser en devenant laiteuses..
La cathédrale est le plus vieux monument de Santarem, de style colonial baroque elle est blanche et bleue et son intérieur est très simple comparé à ceux surchargés d’ors de Cuzco et Lima.
Une visite au fish market où tous les étals sont fermés en cette fin d’après-midi me fait revenir au bus déçue. Ceux qui sont restés ont pu cependant voir le plus gros poisson que l’on pêche dans l’Amazone mais dont le nom portugais ne me dit rien !
Qu’il est bon de rentrer à bord dans des vêtements moites que l’on va abandonner pour une douche rafraîchissante ! La chaleur est beaucoup moins forte que je le craignais : une brise vient de la forêt et du fleuve, même si le degré d’humidité est élévé.
Encore une tentative Internet : la connexion est (relativement) aisée… et je découvre avec stupéfaction que j’ai déjà « mangé » 101 minutes ! Mais où ??? J'ai lu mes courriers et éliminé les 9/10e mais n'ai pas le eu temps d’éditer mon billet sur le blog, il est déjà temps d’aller dîner. Je fais deux repas quotidiens : le petit-déjeuner que je me fais servir en cabine pendant que Joyce va rejoindre ses copains-copines au Lido, et le dîner gastronomique auquel je ne résiste pas. Je fais l’impasse sur le lunch, le tea-time de 3 o’clock et ses pâtisseries…
Linda et Mike sont eux, allés en forêt voir la végétation de l’Amazonie, mais ils n’ont vu aucun animal. Deedee est restée dans sa véranda avec ses jumelles pour observer les activités du port.
11 – Boca da Valeria – Brésil
Samedi 15 janvier 2011
Quelle déception cette sortie dans l’île de Boca da Valeria ! Je m’en veux de ne pas y avoir pensé avant… Car ils sont là… de l’autre côté du tender. Deux canots avec femmes et enfants exhibant un pauvre animal attaché par une ficelle et agrippé à la manche d’un garçon : peut-être un aï ? ils proposent pour quelques dollars des colliers bracelets et perles de bois, et les passagers dispensent déjà largement leurs bank-notes.
Dès l’arrivée, des enfants me prennent la main « My friend… » et, aucun doute, nous sommes sur une scène de théâtre : ces Indiens d’Amazonie nous font un show costumé en étalant qui un agouti, qui un aï, qui un serpent, et autres… Ils se sont vêtus des plumes dont se paraient leurs ancêtres les jours de cérémonie. Joyce donne un dollar par photo prise… Suis-je radin ? Je me refuse à entrer dans ce jeu de charité-corruption. Vraiment, que peuvent faire ces gens des dollars ainsi grappillés sur leur île où ils vivaient heureux de leur pêche il n’y a pas si longtemps ? Je suis revenue très vite au tender, baissant la tête, tandis qu’une adolescente me touche les cheveux sur la nuque… Je n’ai vu aucun adulte de l’île avec les cheveux blancs, et les autres visiteurs ou presque sont tous coiffés de chapeaux ou casquettes, et les autochtones ne sont pas en âge de blanchir.
Selon le capitaine, l’Amazone est une poubelle qui draine toutes sortes de choses jusqu’à la mer. Nous sommes pour le moment immobilisés par un tronc d’arbre qui s’est pris dans une hélice et le commandant va faire une marche arrière pour tenter de le dégager ; le bateau va rouler bord sur bord… de plus, le niveau du fleuve est plus bas que la normale, ce qui rend le volume des épaves d’autant plus important.
Le show est avancé à 18.30 h pour cause de championnat de football (américain). C’est une redite de Luke, le jongleur qui se donne beaucoup de mal en apparence pour rester debout sur un plateau posé sur un rouleau lui-même posé sur sa malle. Avec l’aide de deux hommes et sa maladresse feinte, il arrive à tenir un bon quart d’heure en laissant l’assistance pliée en quatre. Il jongle avec trois coutelas lorsqu’il a pu enfin trouver seul son équilibre. Suit Simeon Wood le flûtiste qui, ainsi que tous les participants au show, parle beaucoup entre ses morceaux joués. Puis arrive l’incomparable Suzy Woods (son nom vaut cher au scrabble) et sa somptueuse robe-fourreau pailletée et dorée. Elle joue de son corps parfait en se déhanchant en mesure et l’effet Marilyn Monroe est garanti…
Je me suis éclipsée pour tenter une fois de plus de me connecter et donner des nouvelles de la Bourlingueuse